Les sandres sont représentés dans le monde par un seul genre qui regroupe 5 espèces distinctes (3 espèces européennes et 2 espèces américaines). Le sandre commun est l'espèce qui peuple nos cours d'eau, lacs et canaux. Il appartient à la famille des percidés dont fait partie notre perche commune.
Cette espèce typique de l'Europe Centrale et orientale est apparue dans nos eaux à la fin du XIX siècle et au début du XXème siècle. Il semblerait qu'elle ai d'abord été introduite dans le Rhin (1888 et 1910) avant de coloniser la Saône et le Doubs depuis le canal du Rhône au Rhin suite aux grandes crues de 1910. Peut-être aussi qu'elle a simplement été introduite volontairement car par la suite cette espèce n'a cessé d'être introduite dans tous les grands bassins français.
L'étymologie latine du sandre (Stizostedion lucioperca) est particulièrement évocatrice de la morphologie de ce poisson ; stizostedion signifiant "à gorge piquante", lucio évoquant le brochet et perca la perche. Voilà pourquoi on l'appelle parfois Perche-brochet.
Photo : Julien Corget
Pour en revenir au sujet principal de l'article, à savoir la reproduction du sandre, il faut tout d'abord évoquer sa période de reproduction dans nos eaux.
Il est communément admis que le sandre se reproduit en milieu de printemps voire même dans une partie de l'été puisque la littérature scientifique décrit une reproduction se déroulant d'avril à aout (Les Poissons de France - Edition Biotope) . En France cette période de reproduction est majoritairement observée du mois d'avril à la mi juin, ce qui soulève de nombreux débat dans la communauté halieutique quant à la période de fermeture de la pêche de cette espèce.
Dans nos eaux douces de France Métropolitaine, les mâles sont plus précoces et sont considérés comme matures à l'âge de 2 à 3 ans. Pour les femelles, il faut attendre l'âge de 4 ans.
Le sandre fait parti des espèces dites "gardien de nid" (Cf article : Stratégie de reproduction des poissons). En effet , le mâle prépare un nid (1m²) sur des fonds propres de sables grossiers ou de gravier garnis de végétation courte et de racines, encombrés de troncs d'arbres et de branchages immergés.
Pour trouver de sites de ponte appropriés, le sandre est capable d'effectuer des déplacements de plusieurs dizaines de kilomètres. Le mâle tend parfois à rester fidèle au même site de ponte d'une année à l'autre.
Photo : Julien Corget
Après la ponte et la fécondation des œufs, le mâle assure l'entretien et le nettoyage du nid contre le dépôt de particules fines de vase au moyen d'un courant créé par le battement de ses nageoires. L'oxygénation des oeufs est par la même occasion effectuée.
Ce qui reste très particulier chez cette espèce c'est l'agressivité que montre le mâle envers tout intrus au point même d'attaquer parfois des plongeurs (Cf vidéo de Filfish). Il se montre alors vulnérable quand certains pêcheurs le pêchent sur ses frayères. Il attaque tout ce qui s'approche du nid.
Mais le fait que le mâle se montre très protecteur envers sa future descendance associé à la forte fécondité des femelles ( 200 000 ovocytes par kg contre seulement 30 000 ovocytes par kg chez la femelle brochet) font de ce poisson une espèce très prolifique. Tous pêcheurs que nous sommes regrettons toujours le manque de sandre, mais l'espèce est loin d'être menacée en raison de sa forte fécondité, de sa stratégie de reproduction (gardien de nid) et de son adaptation au milieu particulièrement artificialisé et pollué (canaux, rivière, chenalisé et navigué).
Autre particularité, le sandre ne jeûne pas pendant sa période de reproduction.
Les œufs sont pondus lorsque la température de l'eau atteint 14 à 16°C. De couleurs brunes et transparentes, ils mesurent 1.5 mm de diamètre et sont disposés en grappe sur des supports variés, le plus souvent végétaux. Puisque le mâle assure l'entretien du nid, l'oxygénation et la protection des œufs, les taux survies de ces derniers et des larves sont élevés.
Ceci assurent un grand succès de reproduction à condition bien sur que les mâles ne soit pas prélevés lors de cette phase cruciale du cycle écologique de l'espèce.
A l'éclosion les larves mesurent 3 à 3.5 mm. Ils se nourrissent d'abord de plancton puis de larves de chironomes. Lorsqu'ils atteignent la taille de 12 mm ils deviennent entomophages, c'est à dire qu'ils commencent à manger des insectes et leurs larves. A la fin de l'été (taille 7 à 15 cm), après plus ou moins 4 mois de vie, ils deviennent presque exclusivement ichtyophages (consommation de poisson). Comme d'autres espèces de poissons carnassiers, il pratique aussi le cannibalisme.
Il reste alors à ces juvéniles un long chemin à parcourir avant d'atteindre l'âge de leur première maturité sexuelle et de se reproduire pour relancer un nouveau cycle de vie.
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